Thรฉmatique rรฉcurrente de ces derniรจres annรฉes, les familles en transformation gravitant autour dโun duo pรจre-enfant ont la cรดte. Il y a quelques temps, Sweetness and Lightning mettait en scรจne un pรจre rรฉcemment veuf apprenant ร cuisiner aux cรดtรฉ de sa fille. Un autre pรจre veuf cachait son travail de mangaka ร sa fille dans Kakushigoto. Barakamon prรฉsentait lโamitiรฉ quasi-filiale entre un calligraphe et une gamine insulaire. Rรฉcemment, un nouveau reprรฉsentant a fait irruption et a gagnรฉ mon cลur bien assez vite. Mieux encore, il apparait comme une revanche sur Usagi Drop, maitre du genre aux qualitรฉs indรฉnombrables. En 2011, le titre avait brillรฉ lors de son adaptation animรฉe, mais son manga trainait un terrible dรฉfaut : confondre en toute fin famille et romance dans une sorte dโinceste impardonnable. Deaimon lui ne se plante pas et narre un enchevรชtrement de relations variรฉes et maitrisรฉes dans un cadre somptueux qui รฉlรจve la sรฉrie en un รฉvรจnement incontournable du printemps 2022.


Le Ryokushou, une pรขtisserie familiale installรฉe ร Kyoto, est le lieu principal de lโhistoire de Deaimon. Cโest aussi le carrefour de plusieurs vies prenant un virage : quelques jeunes amoureux, une employรฉe de bureau reconvertie ou les dรฉbuts dโune รฉtudiante dans la profession. Au centre, les protagonistes sont Nagomu Irino, un ancien musicien en manque de talent revenu au foyer et Itsuka Yukihira, une fille recueillie ร la pรขtisserie ร la recherche de son pรจre. Comme les titres du genre, Deaimon est vรชtu dโun certain optimisme qui habite les personnages cherchant du mieux dans leur vie : on assiste ร des reconstructions, des remises en question et des transformations, le tout dans les belles rues de la capitale de lโest.



En douze รฉpisodes, Deaimon se consacre ร faire vivre la boutique. Les wagashis, les pรขtisseries traditionnelles qui inondent la sรฉrie, marquent les รฉtapes de lโannรฉe quโon passera avec la famille Irino et ses proches. Elles sont aussi lโobjet dโune conversation, dโun souvenir, le premier pas dโune rencontre ou dโune rรฉconciliation : les tracas dโune fille de famille nombreuse ร percer dans la musique, les retrouvailles dโun vieux couple ou encore lโamour ร sens unique dโun client dรฉprimรฉ. Ces histoires sont aussi lโoccasion de montrer Nagomu se comporter comme une figure paternelle auprรจs dโItsuka quand il nโest pas empotรฉ.
Deaimon appartient bien ร son trope. On ne manque jamais le duo pรจre-fille au centre de lโintrigue. On suit le parcours de deux individus marquรฉes par un abandon amer : Nagomu par sa carriรจre et Itsuka par ses parents biologiques. Leur rencontre anodine et la construction progressive de cette โfound familyโ1 est un plaisir ร suivre qui trouve beaucoup dโexpressivitรฉ dans les confrontations dessinรฉes par Rin Asano, une vรฉtรฉran kyotoรฏte du manga.

Si le manga nโa pas ร proprement parler de faiblesses techniques, lโadaptation sโest chargรฉe dโen sublimer les qualitรฉs. Le casting vocal a ses dinosaures habituels comme Rikiya Koyama et Sayaka Oohara, mais parรฉs dโun accent du kansai plutรดt efficace. On peut saluer la performance plus inรฉdite et rรฉussie de Kozue Yuuki dans le rรดle dโItsuka qui en fait une fille รฉnergique avec du caractรจre. On rit volontiers des gaffes de Nagomu grรขce aux lamentations de son doubleur Nobunaga Shimazaki qui sait rectifier le tir en surprenant dans les petits moments charismatiques.
Kyoto nโa jamais eu besoin dโaide pour resplendir ร son ordinaire mais la ville est racontรฉe ici sous le prisme de couleurs chatoyantes et รฉclatantes. Elle sโaccorde brillamment aux saisons : nombreux sont les plans qui se rรฉpรจtent au crรฉpuscule, en hiver, sous un soleil รฉclatant ou sous les feuilles dโautomne. Elles sont aussi un bon outil scรฉnaristique pour donner du relief aux รฉmotions des personnages. Rarement les alentours dโune pรขtisserie nโont รฉtรฉ aussi plaisants et รฉvocateurs. Jโai dรป, au cours de mes visionnages, rรฉcupรฉrer une cinquantaine de dรฉcors prรชts ร gonfler mes dossiers dโimages.





Un outil qui ne marche pas trop, cโest le character acting. On sent que la sรฉrie nโa pas bรฉnรฉficiรฉ de tout le soin imaginable. Par moment, les personnages peuvent paraitre rigides. On aurait apprรฉciรฉ quelques gestes supplรฉmentaires dans la confection des pรขtisseries et les quelques concerts, ร lโimage de sรฉries comme Bocchi the Rock ou Koufuku Graffiti. Heureusement, la sรฉrie compense ses manques par un character design trรจs expressif, la prestation dรฉjร รฉvoquรฉe des doubleurs et des choix de cadrage et de mise en scรจne judicieux et rรฉflรฉchis. Les conversations sont bien dirigรฉes, dynamiques et sont habilement associรฉes ร la bande son.
Il est nรฉcessaire dโexiger plus de Deaimon ร ce monde et en gรฉnรฉral plus de sรฉries de ce genre. Puisquโil nโy a pas de diabรจtes pour ces variรฉtรฉs de sucre je recommande mรชme de sโen faire prescrire par un mรฉdecin. Il en va de votre santรฉ รฉvidemment et qui ne dirait pas non, du coup ร une saison 2 ? Au moment de la publication de lโarticle, lโattente commence ร devenir longue mais on croise encore les doigts. Si vous ne vous รชtes pas encore lancรฉ, jโespรจre que vous pourrez jeter un oeil ร ces histoires kyotoรฏtes comblรฉes de douceurs.

Bibliographie
Rajouter Deaimon sur ses listes
3 articles pour forger encore plus son avis sur Deaimon
- Lasteve : L’anime feel-good Deaimon
- Shoshosein : Avis sur Deaimon
- AnimeFeminist : Deaimon – Episode 1
Merci ร Corentin de Plan Tatami pour ses recommandations kyotoรฏtes
- Ryokujuan Shimizu : Un confiseur spรฉcialisรฉ en Konpeito basรฉ ร Kyoto
- Demachi Futaba : ยซย une boutique trรจs rรฉputรฉ pour ses mame mochiย ยป
- Nyokei Kazoku (1963) : Un film de Kenji Misumi sur une famille d’adoption
- Found Family : Un trope ou des individus, des amis ou des proches qui ne sont pas liรฉs par le sang finissent par faire communautรฉ grรขce ร leur attitude et leurs comportements que ce soit intentionnel ou non. Cf. Dรฉfinition de Urban Dictionary. โฉ๏ธ
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