Shiba Edition a ouvert l’année avec Comme une Famille, un lancement en 2 tomes autour d’une famille recomposée qui connaitra bientôt son 3e tome. Un thème qui continue d’avoir son succès d’autant que les adaptations anime ont foisonné ces derniers temps. Au sein de cette rude compétition, l’œuvre d’Asou Kai a-t-elle son propre mordant ? Rien que pour la formule, j’ai envie de dire que ce qui fait l’attrait de ce manga est peut-être à trouver dans son absence d’originalité.
L’intrigue s’intéresse à une autrice qui un jour se retrouve à accueillir et élever les neveux de son copain récemment orphelins. Une héroïne tiraillée par son manuscrit, un partenaire capricieux et nonchalant, un écolier plus qu’adorable et un collégien trop débrouillard se mettent à occuper le même toit assez rapidement et comme le titre français l’invite, à former Comme une famille. Le récit s’intéresse ainsi aux défis assez ordinaires de la parentalité au Japon. À savoir gérer les repas de 4 personnes, les exigences en maternelle et au collège, la santé et les habitudes de chacun, les religions et coutumes de chaque famille et la conciliation avec le travail.
Le manga n’est ainsi pas hilarant (excepté 2-3 blagues), n’abonde pas en twists et ne fait ni la part belle aux pâtisseries comme dans Deaimon, ni au travail d’auteur comme dans Kakushigoto. Les parents biologiques et leur décès prématuré (encore un accident impliquant une voiture) ne sont pas le gros du sujet. Le manga se penche sur des choses plus terre-à-terre comme aligner le ménage, les repas, les courses et les tracas de chaque jour. Et c’est ainsi que le manga crée son propre rythme : en narrant ces tâches usuelles comme ce qu’elles sont, des préoccupations nécessaires, difficiles et parfois urgentes.
Il en résulte un manga assez verbeux qui doit beaucoup au talent d’Asou Kai pour être agréable à la lecture. Ses compositions bien aérées n’hésitent pas à se passer des décors pour gagner en clarté. La préférence va aussi à des trames d’arrière-plan originales avec des motifs lapins, cerisiers ou étoiles qui détonnent.On se retrouve avec des chapitres assez bien digestes mais mémorables. Le tout est bien aidé par notre héroïne, Kinaho. Bavarde sur son quotidien et très expressive auprès de ses nouveaux enfants, elle devient rapidement très attachante dans sa façon de livrer le moindre état d’âme.
Quand cette famille recomposée est mis en comparaison à d’autres, l’histoire prend du relief. Dommage que le dessin ne varie pas davantage les silhouettes et les visages mais les interactions accrochent l’attention et l’empathie. Des constructions d’amitié aux petits tracas d’enfants, elles sont aussi l’occasion de donner un sympathique message de société. En plus, bien que notre héroïne ait beaucoup de mal à gérer son travail à domicile et cette nouvelle famille, elle se débrouille bien et parfois mieux que d’autres. Le titre français « Comme une famille » apparait ainsi un peu caduque, on n’entend pas une égalité avec le terme « Comme » mais plutôt simulacre, semblant, imitation. Est-ce pour autant mieux que le titre japonais « No, Yô Na » qui signifie « Comme quelque chose » ? C’est original, amusant mais surement moins évocateur que le titre choisi par Shiba Edition.
Plus qu’un récit autour d’une famille, Asou Kai fait la part belle à l’entraide. Autant celle des mères devant les consignes difficiles des écoles que celle des enfants qui s’adaptent à leur nouveau foyer pendant que le copain de l’héroïne lâche progressivement son comportement de mec paresseux stéréotypé pour s’impliquer davantage.
Pour reprendre ma formule du début, si je dis que le manga se démarque par son absence d’originalité, c’est parce que contrairement aux habitués du trope de la found family, le thème est plus simple et traité en détail. Pas de monde fantastique comme Le Garçon et la Bête ou de calligraphie comme dans Barakamon. Ici, on n’a qu’une famille qui se construit de façon très didactique, au point de ressembler à un tutoriel assez prenant même quand le point de départ est un évènement tragique.
Et pour que le tutoriel soit plus réaliste, le manga manque encore plus d’originalité que ses compères en ayant pour personnage principale une héroïne. Pas de situation fantaisiste où un père élève seul ses enfants, situation qui plaît beaucoup dans la fiction mais encore très rare de nos jours. Ici, c’est une femme, avec la charge mentale qui va avec, mais aussi des exigences pour que tout ne repose pas sur ses épaules. Faisant ainsi du manga, une œuvre agréablement contemporaine.
L’autrice, habituée aux Boy’s Love, n’a pas opéré un virage en débutant Comme une Famille en 2017. Elle montre qu’elle est compétente dans les deux genres et continue de publier dans les deux registres avec une nouvelle publication en 2024 et un 6e tome de Comme une Famille en 2023. Si le lancement en 2 volumes par Shiba Edition n’était pas une nécessité, il donne de quoi grignoter avant le 3e pour le 5 avril 2024.
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- Lire l’article de Koiwai sur le tome 1 de Comme une Famille
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